Mathurin Méheut est un peintre et illustrateur français, né le 19 octobre 1882 à Lamballe, en Bretagne, et décédé le 26 février 1958 à Paris. Il est surtout connu pour ses œuvres représentant la vie quotidienne, la nature et les traditions de la Bretagne Né dans une famille d’artisans, il commence son apprentissage dès 1896 à Lamballe chez Mathurin Guernion, peintre en bâtiment. Puis, En 1902, il entre à l’École des Beaux-arts de Paris.
Méheut a montré un intérêt précoce pour l’art, et ses talents ont été encouragés par sa famille. En 1902, il s’installe à Paris et intègre l’École nationale supérieure des Beaux-arts, où il étudie sous la direction de Fernand Cormon. Pendant son séjour à Paris, il fréquente également l’Académie Julian.
Son style artistique distinctif combine l’influence du symbolisme et du modernisme avec une approche réaliste. Méheut a trouvé son inspiration principale dans les paysages et les coutumes de la Bretagne, sa région natale. Ses œuvres présentent souvent des scènes de la vie rurale, des pêcheurs, des marins et des animaux, capturant l’essence de la culture bretonne.
Au cours de sa carrière, Méheut a exploré divers médiums artistiques, dont la peinture à l’huile, la gravure sur bois, la céramique et l’illustration. Il a travaillé sur des projets variés, illustrant des livres, créant des affiches et collaborant avec des revues et des journaux. Ses compétences en tant qu’illustrateur ont été particulièrement remarquées, et il a contribué à populariser l’image de la Bretagne à travers ses œuvres.
Dans les années 50, Mathurin Méheut participe à la publication de deux ouvrages sur la pêche boulonnaise :
La pêche artisanale à Boulogne-sur-Mer, calendrier pour les pêcheries Delpierre, 1956.
Roger Vercel, grand port de pêche, édité par le Comité d’entraide aux familles des marins péris en mer du chalutier Colbert, Nantes, Imprimerie Beuchet et Vandenbrugge, février 1956.
En plus de son travail artistique, Mathurin Méheut a été engagé dans la promotion des arts en tant qu’éducateur. Il a enseigné à l’École des Beaux-arts de Rennes et a joué un rôle actif dans la vie artistique de la Bretagne.
En 1956, Mathurin Méheut est élu à l’Académie de Marine. Il meurt à Paris le 22 février 1958, puis inhumé à Paris au cimetière de Montparnasse. Son héritage artistique perdure, et les œuvres de Mathurin Méheut sont exposées dans de nombreux musées en France.
Sa contribution à la représentation visuelle de la Bretagne, et plus largement de l’art maritime régionaliste dont le Boulonnais, associée à son engagement envers l’art et la culture, ont consolidé sa place parmi les artistes notables du début du 20ème siècle.
Marie Clarisse Marguerite Guillet est née le 19 septembre 1844 à Paimbœuf, dans une famille d’artistes. Son père Louis Claude Aristide Guillet est peintre et dessinateur, et sa mère Clarisse Marie Brault peint également. Marie Cazin est tout d’abord élève de Juliette Peyrol (1830-1891), la sœur de la fameuse Rosa Bonheur (1822-1899), à l’École de dessin de Paris, puis elle suit les cours du peintre Jean-Charles Cazin (1841-1901), qu’elle épouse finalement quelques temps plus tard en 1868.
Le mariage avec un artiste connu facilite l’accès aux Salons, limite les critiques et renforce le mécénat de la bourgeoisie. De cette union, naît Michel Cazin, peintre et graveur. Après la mort de son mari Jean-Charles Cazin en 1901, Marie Cazin quitte progressivement Paris pour revenir à Equihen dans la grande maison-atelier du couple, perchée sur la falaise (disparue lors de la Seconde guerre mondiale) : « Marie Cazin, ayant gardé son originalité propre auprès de son illustre mari, désirerait avoir les moyens de renoncer à son atelier de Paris pour s’installer définitivement à Equihen où l’existence est moins dispendieuse qu’à Paris« . (Léonce Bénédite).
À partir de 1876, Marie Cazin fait ses débuts au Salon des Artistes français en tant qu’artiste peintre. Elle présente initialement des paysages, des études d’animaux et des figures, notamment des œuvres telles que Étang de Picardie (1876), Village de pêcheurs (1877), Ânes en liberté (1880), et Convalescence (1886). Par la suite, à partir de 1882 avec Tristesse, l’artiste se tourne vers la sculpture, travaillant avec divers matériaux tels que le bronze, le plâtre et le grès coloré. En 1883, elle expose un buste en bronze grandeur nature intitulé David. Son œuvre la plus célèbre, Les Jeunes filles, un groupe en bronze, est dévoilée en 1886 et acquise par l’État en 1899, pour être conservée au musée du Luxembourg à Paris. Elle crée également le buste en bronze La Fortune en 1883.
À partir de 1890, elle présente ses créations au Salon de la Société nationale des Beaux-arts, devenant sociétaire en 1891, ce qui témoigne de la reconnaissance de son statut professionnel. Parmi ses expositions notables figurent La Science et la Charité (1893, groupe en bronze) et une statue de Jean-Charles Cazin (1904). Elle prévoit également de réaliser un monument intitulé La Nature en hommage à son mari, décédé brutalement en 1901.
Les œuvres artistiques de Marie Cazin, réalisées de manière régulière entre 1876 et 1914, reflètent l’influence de ses engagements sociaux associés à sa vie personnelle. Plusieurs de ses créations mettent en évidence sa préoccupation pour la condition des femmes dans leurs rôles les plus modestes, à une époque où les femmes artistes s’émancipent regroupées à l’Union des Femmes Peintres de Virginie Demont-Breton. Parmi ses œuvres socialisantes, on peut citer les tableaux Oubliées montrant deux pauvres femmes et leur enfant posés sur un banc (musée de Tours, 1890), Femme de Marin (bronze, musée d’Orsay) et Vie obscure (1901), ainsi que les bas-reliefs en bronze (1893) intitulés L’Étude et La Charité (ou Visite à l’accouchée).
En tant que belle-sœur du docteur Henri Cazin, un spécialiste des maladies osseuses infantiles, elle est également l’auteure du Monument aux docteurs Cazin et Perrochaud à Berck (1893), représentant la Science et la Charité soignant un jeune garçon. En raison de ses liens avec les familles Adam et Perrochaud, elle a également créé des monuments destinés aux sépultures de ces familles à Outreau et Boulogne-sur-Mer (cimetière de l’Est). Pour honorer la mémoire de son mari, elle réalise plusieurs bustes et statues le représentant, ainsi qu’un ensemble monumental érigé sur sa tombe au cimetière de Bormes-les-Mimosas, dans le Var.
« Mme Marie Cazin — qui sculpte comme elle peint, avec un grand charme de rêverie et d’intimité — expose un groupe en bronze : la Science et la Charité, complété par un bas-relief également en bronze : les Enfants de l’hôpital de Berck. Ces deux ouvrages, qui font partie d’un monument élevé par souscription à la mémoire des docteurs H. Cazin et P. Perrochaud, seront très remarqués. » (Le Rappel, 1893).
Après la mort précoce de son fils Jean-Michel en 1917, Marie Cazin s’éteint seule à Equihen en 1924. Elle est enterrée à Boulogne-sur-Mer. L’atelier du couple Cazin est rasé durant la guerre 39-45, et le musée qui leur est consacré à Samer, pillé. Aujourd’hui, ses œuvres s’avèrent rares et recherchées.
Vicente Gil Franco est né le 25 février 1898 à Barcelone, d’une famille de commerçants en fruits. Il reçoit une solide formation artistique à l’École Libre des Beaux-Arts de Valence, puis dès 1910 à celle de Barcelone, notamment en sculpture. Orphelin de père, il quitte l’Espagne pour la France en 1918, et travaille comme saisonnier vendangeur en Roussillon. Il s’installe ensuite à Paris puis dans le Nord, où il devient marbrier. En octobre 1925, il rencontre à Lille un étudiant en médecine, Robert Vrasse, qui va le soutenir dans ses projets artistiques futurs. Grâce à Robert Vrasse, Vicente Gil Franco découvre Boulogne et Équihen (juillet 1926), où il décide de s’installer (octobre 1926). Dix années difficiles s’annoncent, marquées par la barrière de la langue et la difficulté de vendre son art. A cette époque, il se lie d’amitié avec l’autre chantre de la Marine boulonnaise, le peintre Georges Griois (1872-1944). Vers 1928, la faïencerie d’art Fourmaintraux lui commande ses premières maquettes de statuettes.
Dès 1936, la guerre civile espagnole l’oblige à repartir en Espagne pour y soutenir la république. Deux ans plus tard, l’arrivée de la dictature force son retour à Boulogne. Lors d’une exposition de céramiques donnée en 1939, il rencontre sa future femme. Mais en mai 1940, lors d’un bombardement, sa maison et une grande partie de son œuvre sont détruites. Réfugié à Rodez puis à Paris, Gil Franco ne revient à Boulogne qu’en 1947. Il retrouve une ville anéantie, défigurée à jamais. Malgré tout, l’artiste se remet à la tâche et produit des œuvres toujours plus modernes et abouties, huiles, dessins, gouaches et céramiques, montrant un monde maritime boulonnais finissant. Reconnu de tous, sollicité par la ville et l’État, il ouvre en 1957 la « Rose des Vents« , sa boutique tutélaire installée rue Gustave Charpentier, qui présente et vend son travail. Ce bonheur s’avère trop fugace, Vicente Gil Franco meurt le 6 novembre 1959 d’une embolie, au sommet de son art.
Son œuvre, immense, tant par la quantité des sujets créés que par la diversité des supports, marque profondément Boulogne et ses gens de mer. Cette diversité et cette inventivité se retrouvent également dans sa sculpture. Si Gil franco s’oppose au Naturalisme de l’art officiel, à l’instar des terres-cuites d’Eugène Blot qui l’a précédé, il s’inscrit pleinement dans la lignée du mouvement Expressionniste, initié par Auguste Rodin, chantre de la liberté des formes. Les céramiques de Gil Franco, réalisées dans l’atelier Fourmaintraux à Desvres puis à l’abbaye de Wisques, nous le rappellent de la plus belle des manières.
Déjà, dès la fin des années 1920, Gil Franco propose au public, en marge de ses dessins et autres huiles, de petites sculptures boulonnaises. Il participe d’ailleurs à la 36ème Exposition des Artistes Lillois, installée au Palais Rameau, du 20 avril au 13 mai 1929. Huit œuvres y sont présentées dont « Quai de Boulogne » et « Équihen« , accompagnées d’autres huiles et dessins … Mais surtout, trois sculptures sont exposées : « Pêcheurs de Crevettes« , « Matelote » et « Matelot« . Le catalogue ne fournit pas de clichés de ces figurines, mais elles sont probablement déjà issues d’une production amorcée dans la faïencerie de Gabriel Fourmaintraux à Desvres. L’année suivante, Gil Franco participe à la 37ème Exposition des Artistes Lillois. Seule « Procession à Équihen » (peinture) est portée aux cimaises du 10 mai au 2 juin 1930. Il est vrai que l’artiste peine à trouver sa place parmi tous ces exposants, au demeurant bien installés et à l’art souvent déjà entendu. Aux côtés du vieillissant peintre Paul Hallez, président de la manifestation, et actif depuis près de 40 ans, Vicente Gil Franco apparaît alors comme une véritable curiosité artistique, une attraction convenue pour le public lillois. A cette époque, aux côtés de son œuvre peint, ces premières petites statuettes sont mises en vente chez Berthou, bijoutier boulonnais installé rue Faidherbe.
Dans ces mêmes années, le sculpteur se confronte également à la matière brute. Dès 1928, il réalise une série de plats de cuivre repoussé, martelé et ciselé, qui demandent beaucoup d’énergie et de charisme. L’artiste travaille aussi la pierre, support qui rend si vivants, réalistes et authentiques les visages burinés des gens de mer. Il est vrai que le granit se trouve facilement et coûte bien peu cher pour un artiste encore débutant. Lors de l’exposition donnée en hommage à l’artiste, tenue au musée de Boulogne puis au casino, de mai à août 1970, les organisateurs y présentent trois sculptures réalisées sur pierre dans ces années 1930 : « Porteloise« , « Équihennoise« , et « Groupe de Marins« . Production très limitée certes, mais support tellement moderne et pittoresque à la fois, ces sculptures nées de rochers marins s’inscrivent dans un art moderne naissant. L’artiste travaillera également l’azobé, bois très dur utilisé dans la Marine, afin de réaliser d’imposants sujets notamment « La Relève des Filets« , monumental groupe de marins. Mais c’est surtout de la rencontre entre Vicente Gil Franco et les faïenceries Fourmaintraux, que va naître la production céramiste la plus épanouie de l’artiste, multipliant les différents sujets et thèmes.
Très ancienne, la maison Fourmaintraux compte une dizaine de générations de potiers, établis depuis la fin du 17ème siècle. Habitués à travailler la glaise avec une technique assurée, les potiers successifs de la maison Fourmaintraux s’imposent à Desvres en produisant des objets décoratifs, ainsi que des carreaux de faïence. Gabriel Fourmaintraux (1886-1984) est le plus illustre représentant de cette dynastie. Après un passage à la manufacture de Sèvres (1902), il reprend la faïencerie familiale et développe les collections, en proposant une multitude de boîtes, vases, sujets, encriers et autres objets de style art Déco, puis des objets publicitaires. La faïencerie atteint alors à son apogée, et c’est dans ces conditions favorables que les ateliers accueillent d’autres créateurs à l’instar de Vicente Gil Franco et de René Delarue. Dès la fin des années 1930 et jusqu’au début des années 1950, malgré l’interruption provoquée par la Seconde guerre mondiale, Gil Franco dessine de nombreux modèles destinés à la faïencerie Fourmaintraux. Du plus simple au plus élaboré, de la petite plaque émaillée à la grande céramique, en passant par des objets du quotidien décorés, la production s’avère étendue. Grâce au Livre des formes de la faïencerie, où sont conservés les dessins préparatoires de tous les artistes, les créations de Vicente Gil Franco demeurent bien connues. D’après leur numérotation, ses dessins préparatoires semblent être antérieurs à mai 1940, même si nombre de céramiques sont réalisées après la guerre.
Suivant les quelques modèles primitifs produits vers 1928-1929, Gil Franco renoue donc avec Fourmaintraux au milieu des années 1930. A cette époque, Gabriel Fourmaintraux crée une collection sous le patronyme « Cloda Mano« , contraction heureuse des prénoms de ses enfants Claude et Françoise. De consonance sud-américaine, très à la mode dans l’ambiance Art Déco, « Cloda Mano » décline surtout des sujets animaliers, en faïences craquelées ou décorées. Gil Franco s’inscrit dans cette collection, mais en créant des figurines de la Marine boulonnaise. Les sujets se montrent assez « simplistes« , tant dans leur silhouette, quelque peu hiératique d’inspiration cubiste, que dans leurs coloris aux tons pastel, à la palette peu étendue, un tantinet fade. Deux sujets, particulièrement emblématiques, sont alors commercialisés. Un « Groupe de Boulonnaises » (trois Boulonnaises au Soleil, accolées sur une base triangulaire) et un « Couple de Porteloises » (deux matelotes groupées) constituent les deux seuls modèles proposés par l’artiste, sous les références 4909 et 4910 du Livre des formes. D’une hauteur de 20 cm, ces petits sujets, assez rudimentaires, n’expriment pas encore l’ampleur du talent créatif de Gil Franco.
En marge de ces statuettes, Vicente Gil Franco va également travailler la technique de l’aplat. De 1936 à 1939, la faïencerie Fourmaintraux commercialise de petites plaques décoratives rectangulaires, sculptées en creux, agrémentées du thème maritime. Les personnages et les groupes apparaissent sur un fond animé de vagues, accompagné de la silhouette d’un navire ou d’une mouette. Traitées dans des tons pastel, ces plaquettes explorent le folklore boulonnais : « Plaque à la Matelote » (6391), « Plaque aux Matelotes de Profil » (6392), « Plaque à la Matelote de Profil » (6393), « Plaque aux Porteloises à la Chapelle » (6406), « Plaque aux Matelots devant le Phare » (6407), « Plaque aux Matelots au Panier de Poissons » (6408), « Plaque au Matelot à la Pipe » (6409), « Plaque au Matelot au Panier » (6410), « Plaque aux Porteloises à la Procession » (6411). Ces petites plaques deviennent aussi prétexte à servir de couvercles pour deux boîtes à tabac : « Boîte à Cigarettes Boulonnaise » (6419) et « Boîte à Cigarettes Porteloise » (6420), très en vogue à l’époque. Enfin, la faïencerie demande à l’artiste de réaliser d’autres objets décoratifs à l’instar d’un « Pot Décoratif Sculpté » (4713), d’un « Cendrier Poisson » (4759), d’une « Corbeille de Fleurs » (4760), d’une « Coupe aux Chérubins » (4769) et d’un « Pot à Tabac » (4770). La Seconde guerre mondiale interrompt brutalement cette association naissante, et ces petits modèles sont alors abandonnés.
Après la guerre 39-45 et son retour à Boulogne en 1947, l’artiste reprend sa collaboration avec la faïencerie Fourmaintraux. Plus mature dans son œuvre, Gil Franco étend largement sa gamme et complexifie sa production. Il s’agit alors de revisiter les traditions et les métiers de la Marine boulonnaise. Pour ce faire, il propose des œuvres plus abouties, plus travaillées, plus stylisées et plus grandes aussi, afin de renouer avec un public plus large. Le cheminement, du dessin préparatoire à la céramique finale, semble immuable. Tout d’abord, Vicente Gil Franco réalise un premier croquis, qu’il enrichit et améliore, annote et précise, notamment pour la taille et les coloris. Ensuite, une fois satisfait, l’artiste réalise l’étape la plus importante. Il sculpture la « mère de moule« , c’est-à-dire le modèle unique qui va servir à créer le moule. C’est à partir de ce moule que le potier réalise la production de masse. Chaque céramique est ensuite « tirée » à 200, 300 ou 500 exemplaires, selon les modèles, pour répondre à la demande du grand public. Les figurines reçoivent une double signature à la base, dans la masse avec « GF » pour Gil Franco, et tamponnée à l’encre de « GF-Desvres-France » pour justifier la faïencerie Fourmaintraux. D’après le Livre des formes, on peut définir de grandes catégories dans cette production céramique.
Les sept premiers modèles s’attachent à témoigner de la dureté des métiers de la Marine boulonnaise : la « Porteloise » (4677), la « Boulonnaise » (4678), la « Matelote au Fichu » (4682), la « Matelote à la Cape » (4683), le « Couple de Matelotes avec Enfants » (4686), le « Galant et la Boulonnaise » (4694) ainsi que la « Marchande de Crevettes » (4695). Cher à l’artiste, ce thème se perpétue dans son œuvre céramique, pour ces modèles édités à 500 exemplaires chacun. Dans cette première réalisation, Fourmaintraux ne trahit pas l’artiste. Au premier regard, les grandes céramiques, de 25cm à 30cm de hauteur, impressionnent par leurs coloris chatoyants et la multitude de leurs détails. Parfaitement authentiques, les costumes demeurent finement détaillés, du bijou (boucles d’oreilles dites « milanos« ) à la coiffe (soleil boulonnais, coiffe courte ou fichu), du costume (châle à franges) en passant par l’outillage (manne, filet). Les visages semblent précocement marqués, taillés par des arêtes franches, parfois austères. Toujours travaillés en volume, les bras tombants organisent le mouvement et apportent le côté dynamique à l’ensemble. Enfin, le dos courbé de certains modèles retranscrit une vie de dur labeur où le travail manuel prend toute son ampleur. Dans cette première série de céramiques, au demeurant très féminines, Gil Franco s’évertue ainsi à témoigner son attachement et son admiration à l’endroit des gens de mer. Cette création est la plus connue de son œuvre céramique.
Plus tardives, d’autres figurines en céramique émaillée enrichissent l’œuvre. Bénéficiant de tirages moindres, généralement de 100 à 200 exemplaires, leurs tailles sont plus variables. Certaines atteignent une certaine ampleur, notamment quand elles sont nanties d’imposants équipements (filets, mannes, caisses) : « Porteuse d’Eau » (4762), « Matelote » (4763), « Matelot au Panier » (4764), autres « Matelote » (4765) et « Matelot » (4766), « Marchande de Poison » (6398), « Matelot sur le Quai » (6399), « Matelot au Filet » (6401), « Deux Matelots à la Manne » (6402), « Couple de Boulonnais » (6403) et « Couple à la Lanterne portant un Filet » (6405). Toutes ces œuvres, d’une grande qualité, demeurent néanmoins dans la lignée commerciale imposée par Fourmaintraux. Moins consensuelles, mais ô combien plus avant-gardistes, les céramiques produites à l’abbaye de Wisques montrent une plus grande ampleur de la qualité artistique de Vicente Gil Franco.
Durant l’hiver 1951-1952, Vicente Gil Franco s’installe à l’abbaye de Wisques. Fondée le 23 juillet 1889, l’abbaye Saint-Paul de Wisques se tourne rapidement vers des réalisations artistiques. L’abbé Dom Bellot (1876-1943) dirige un fameux cabinet d’architecture qui initie le style « Dom Bellotisme » (constructions associant brique polychrome et béton). En 1946, le Père Bouton crée les premiers modèles servant à la fabrication de céramiques, notamment des carreaux en céramique, décorés d’émaux peints à la main, reprenant l’histoire des Saints. Après une cuisson à 800 degrés, ces carreaux sont ensuite encadrés et vendus au public. L’atelier de poterie propose également des plats, pichets et autres objets décoratifs, à motifs plus profanes.
Dans cette abbaye, Gil Franco installe son atelier éphémère. Il y conçoit une série de 29 modèles pétris de sa main, reproduits en nombre très limité, de dix à une vingtaine d’exemplaires. Il réalise également quelques pièces uniques, témoin de l’étendue de son savoir-faire. Statuettes, groupes de personnages, plats circulaires et plaques ajourées composent sa création. Son cheminement artistique est immuable ; Gil Franco modèle la terre, au doigt et à la spatule. Puis, après une première cuisson, il pose l’émail en couleur et recuit l’ensemble. Technique difficile à appréhender, le résultat s’avère éblouissant : la couleur est intense et les irisations des surfaces éclatent aux yeux, tout en nuances. Presque cramoisie, aux reflets chatoyants, cette cohue chromatique exalte les personnages, amplifie la courbure des corps sous le poids des « attirails« , et renforce la dureté des visages striés par le labeur. Sous chaque sculpture, l’artiste signe et numérote son travail, au milieu des marques salutaires laissées par ses doigts façonneurs. Déjà, en décembre 1951, une première exposition de ces céramiques expérimentales est organisée à Lille, et un film, consacré à son séjour et à son atelier, y est projeté le 17 décembre par son réalisateur, le docteur Porichez. Datées de 1952, inspirées par le thème récurrent des traditions maritimes, ces 489 pièces se répartissent ainsi :
– 4 grandes pièces uniques (groupe de personnages) dont « Retour de Pêche« , « Procession de Notre-Dame » et deux plats.
– 5 groupes de personnages (50 exemplaires) dont « Famille Boulonnaise« , « Retour de Pêche » et « Pêcheurs Ramendant leurs Filets« .
– 6 sujets (75 exemplaires) dont « Pêcheur et son Filet« .
– 5 plats circulaires en céramique polychrome (115 exemplaires) aux décors lacustres, maritimes ou boulonnais dont « Assiette à l’Hippocampe« , « Plat aux Armes de la Ville de Boulogne-sur-mer« , « Plat au Pêcheur« , « Plat à décor d’un Couple de Pêcheurs et d’une Ancre » (diamètre de 22cm, 25 exemplaires).
– 8 plaques (circulaires, carrées ou rectangulaires) en céramique polychrome (245 exemplaires) reprenant les thèmes maritimes boulonnais typiques, dont « Plaque à décor en relief de Pêcheurs » (10 exemplaires), « Plaque circulaire à décor de Navire » (25cm de diamètre), « Plaque rectangulaire à décor en bas relief de Marin et de Matelote » (15cm x 32cm, 15 exemplaires).
Au terme de cet épisode créatif, au demeurant assez éphémère, Gil Franco continue à produire des plaques ajourées, à partir de moules anciens, notamment « Boulonnaise au Soleil au Panier de Poissons » et « Marin au Filet devant son Bateau« . Celles-ci sont montrées lors d’une exposition tenue en octobre 1956 dans le hall du journal de la Voix du Nord à Boulogne. L’artiste reprend également d’anciens modèles qu’il travaille sur une gamme de coloris inédite. De grands plats sont également présentés, comme « Neptune » et « Marin Boulonnais à l’Ancre« . Le fond de ces plats apparaît mat, le relief des sujets est accusé par un trait creux, et les couleurs tendres évoquent le pastel. Dans les dernières années de sa vie, Vicente Gil Franco témoigne ainsi de sa « joie de créer des pièces nouvelles, mais aussi la difficulté de la mise au point avant d’y parvenir« . Dès 1957, dans sa boutique nommée la « Rose des Vents« , installée rue Gustave Charpentier à Boulogne-sur-mer, l’artiste produit encore une série de plats (18 cm). Assez sobres, sur un fond blanc nacré, flanqués en leur centre d’un petit motif, personnage ou animal marin, ces plats en céramique polychrome constituent les dernières faïences proposées par Gil Franco.
Plus que tout autre artiste, Vicente Gil Franco a su rendre le sentiment de fardeau, l’angoisse et la résignation de cette population laborieuse aux visages burinés. A l’instar d’un Jules Adler, chantre du monde ouvrier, Gil Franco se montre particulièrement attaché aux drames et aux difficultés du monde maritime boulonnais. Sans tomber dans un misérabilisme trop facile, cet artiste entier, à travers ses œuvres emblématiques, devient le parfait porte-parole des gens de mer et de leurs peines. Aujourd’hui, ses œuvres céramiques sont conservées au Château-musée de Boulogne-sur-Mer, au musée « A la Belle Époque de la Faïence de Desvres« , au musée de la Céramique à Desvres (« Pêcheur Ramendant son Filet« , céramique de Wisques), au Fonds National d’Art Contemporain (FNAC), et dans de nombreuses collections privées.
Artiste prolifique et Boulonnais très apprécié de son vivant, Vicente Gil Franco s’avère davantage connu pour son œuvre peint que pour son œuvre céramique. Pourtant, du succès commercial des sujets tirés de la faïencerie Fourmaintraux, à la fertilité avant-gardiste des créations de Wisques, les céramiques de Gil Franco restent aujourd’hui d’une modernité et d’une justesse, artistique et ethnographique, impressionnantes. Plus que jamais, Vicente Gil Franco demeure l’un des meilleurs et derniers représentants de l’art populaire des traditions maritimes boulonnaises. Ses céramiques polychromes participent pleinement à cette mémoire collective.
Paul Bernard Morchain est né à Rochefort le 27 décembre 1876, d’une famille originaire de Cambrai. On connaît peu son enfance. Artiste délicat, Paul Morchain manifeste très jeune un goût marqué pour l’art pictural. Il suit les cours de Paul Dupuy à l’Ecole des Beaux-arts de Paris. Mais, hormis quelques conseils prodigués par Eugène Chigot lors de ses venues sur la Côte d’Opale, Paul Morchain travaille sans véritable maître. Il se partage entre la Bretagne (Douarnenez) et le Boulonnais, croquant surtout Boulogne et Equihen, notamment dans cette scène de calfatage prise à Equihen et présentée au Salon de 1910.
Paul Morchain vient à Paris pour exposer. Il débute au Salon des Artistes français en 1906, puis en 1909 obtient une mention honorable, suivie d’une médaille d’argent en 1913 et une médaille d’or en 1920. L’année suivante, il est nommé Peintre officiel de la Marine (1921). Paul Morchain devient un habitué de Douarnenez et de sa région. Il s’impose comme un peintre majeur du Pays Cornouaillais. Son style se situe dans la tradition de ces peintres locaux qui recherchent la vérité et l’atmosphère de la vie locale avec sincérité et qui rappelle l’approche et le style des peintres de Pont-Aven. Paul Morchain a su traduire avec charme tout le côté pittoresque spécial des côtes de la Manche, de la Bretagne ou des Charentes.
En 1929, il présente une rétrospective de son art à la galerie Dalpeyrat : « En ce moment, nous sommes conviés à visiter l’exposition du peintre Paul Morchain. Pour ceux qui sont sensibles aux titres, M. Paul Morchain pourrait faire état d’une très longue liste. Nous retiendrons qu’il est membre de la Société des Artistes français (hors concours) et peintre officiel du Ministère de la Marine. Ce sont des paysages marins qu’il nous a envoyés. Point d’outrances, mais la recherche des délicatesses et subtilités des atmosphères marines, un art vibrant de la vie quotidienne des ports de pêche avec leur population de marins et de barques. Un équilibre parfait de composition et de coloris, une science approfondie des gris, des gris chauds et aériens comme bien peu de peintres savent les peindre. Devant les toiles de Paul Morchain, je pense surtout à la Bretagne. Tout n’est point breton cependant. Les Quais sous la pluie à Dunkerque sont une chose très remarquable. La peinture marine tient une partie de ses charmes des variétés de coloris, des hasards de rapprochement de tons. Les voiles roses, rouges, vertes, ocres et blanches, les coques sombres incrustées de toute la lèpre de la mer, les reflets mouvants sur l’eau profonde sont autant de détails chers aux amants de la mer. Dans les derniers plans des études de M. Paul Morchain, des silhouettes de barque, vaisseaux fantômes, glissent dans la brume. Autre part, un sardinier sortant du port de La Rochelle, toutes voiles dehors avance au rythme allongé de son tangage, vibrant de lumière et de brise.
Comment ne pas remarquer Le Thonier solide sur l’eau, « culotté » par la mer et les tempêtes ? C’est là de la bonne peinture, pittoresque et vivante ; elle le devient encore plus dans certaines études par temps gris où Paul Morchain peint avec une incontestable souplesse la brume en soie d’argent de l’océan, les forêts de mâts, l’envol des filets bleus, les quais humides et glissants de toutes les viscosités de la mer. Les marins garance, silhouettes crânes et robustes, poussent leur barque à la godille, se hissent sur le quai et grossissent les roupes où les événements de la pêche sont commentés. Ces groupes sont pleins de vie et d’animation. C’est une des raisons pour lesquelles la peinture de M. Paul Morchain est attachante et sensible. Le talent du peintre n’a d’égal que son amour de la mer et du port. » (La Vie limousine, mars 1929).
Paul Morchain a une carrière très remplie de salons prestigieux et d’expositions dans les galeries. Il expose au Salon des Artistes français à partir de 1906, au Salon de Rouen en 1925, au Salon de Bordeaux de 1909 à sa mort, au Salon de Lyon en 1914, au Salon de Nantes en 1909, au Salon de Dijon de 1932 à 1938, ainsi qu’au Salon d’Automne en 1921-1922.
Au Salon des Artistes français, il présente notamment :
Le Bassin du Commerce à Boulogne-sur-Mer ; effet du soir en 1907,
Brumes du soir ; Boulogne-sur-Mer et Marée basse ; Boulogne-sur-Mer en 1908 (deux œuvres),
Retour de pêche ; Boulogne-sur-Mer en 1909,
Les calfats en 1910,
Bassin du commerce à Dunkerque ; soleil du soir en 1912.
Il accroche ses œuvres aux cimaises de la galerie Drouant à Paris en 1926, à la galerie Dujardin à Roubaix en 1928. Il expose dans la prestigieuse galerie Georges Petit à Paris en 1922, et surtout en 1927 lors d’une rétrospective avec quarante œuvres. En mars 1935 puis en février 1936, il présente un lot d’œuvres à la Nouvelle Galerie d’Art, rue Esquermoise dans le vieux-Lille, qui reçoit un bon succès.
Ses vues de Boulogne, essentiellement prises près des bassins et sur les quais, sont très bien saisies et justes, dans des gammes chromatiques lumineuses, de plus en plus modernes au fil de sa carrière.
En février 1929, il participe à la grande exposition « Les Fils de Tués » en compagnie du peintre Victor Dupont, installée à la galerie de la Palette Française sur le boulevard Haussmann à Paris. L’exposition rassemble les artistes combattants de la Première guerre mondiale, investis dans les tranchées ou « camoufleurs » pour les équipements à protéger.
Le 28 juillet 1931, alors qu’il se rend en voiture avec sa femme à Douarnenez, Paul Morchain rate un virage et fait une embardée. Son épouse, âgée de 45 ans, est gravement blessée par des éclats de verre à la gorge et succombe rapidement. Très affecté, Paul Morchain assiste à son enterrement à Douarnenez, accompagné de nombreux officiels. Paul Morchain meurt quelques années après, le 26 octobre 1939, à Rochefort.
Ses œuvres se trouvent dans de nombreux musées en France, notamment à Paris (Musée de la Marine), à Bordeaux, Rochefort et Douarnenez. Une rue porte son nom à Rochefort.
Philip Wilson Steer est un peintre britannique de paysages, de marines, de portraits et d’études de figures, il est également un professeur d’art influent. Ses peintures de marines et de paysages ont fait de lui une figure de proue du mouvement impressionniste en Grande-Bretagne. Mais, après 1900, il se tourne vers un style anglais plus traditionnel, clairement influencé par John Constable et William Turner. Professeur de peinture à la Slade School of Art pendant de nombreuses années, il influence des générations de jeunes artistes.
Philip Steer est né le 28 décembre 1860 à Birkenhead, dans le Cheshire, fils d’un portraitiste et professeur d’art, Philip Steer (1810-1871). À l’âge de trois ans, la famille déménage à Whitchurch, près de Monmouth, d’où, après une période d’enseignement à domicile, il fréquente l’école de la cathédrale d’Hereford. Il devient artiste en 1878 et étudie à la Gloucester School of Art puis, de 1880 à 1881, à la South Kensington Drawing Schools. Refusé par la Royal Academy of Art, il étudie à Paris entre 1882 et 1884, d’abord à l’Académie Julian, puis à l’École des Beaux-Arts sous la direction d’Alexandre Cabanel. Il devient alors adepte de l’école impressionniste. À Paris, il est très influencé par les œuvres d’Édouard Manet et de James Whistler, ainsi que par les Impressionnistes français.
Quand il retourne en Angleterre après sa formation, il établit son atelier à Londres et produit surtout des paysages maritimes ou champêtres dans la traditions impressionnistes.
Outre les Impressionnistes français, Philip Steer est influencé par Whistler et, plus tard, par des maîtres anciens tels que François Boucher, Thomas Gainsborough, John Constable et William Turner. L’artiste est alors souvent attaqué par les critiques britanniques, conservateurs, pour ses œuvres impressionnistes telles que Plage à Boulogne. Dans les années 1890, alors qu’il s’éloigne de l’Impressionnisme français, le travail de Steer est de plus en plus apprécié. En 1887, Steer passe quelque temps à la Colonie artistique d’Etaples, où il livre des scènes de plage et des vues du pont de la Canche. Il y reste quelques années, où il croque la population locale, les paysages et des vues de Boulogne comme sa célèbre Vue du Casino en 1892. Au début des années 1890, il commence à peindre davantage à l’aquarelle.
En 1927, Philip Steer commence à perdre la vue à un œil, mais il continue à peindre, principalement à l’aquarelle plutôt qu’à l’huile. Ses compositions deviennent beaucoup plus libres, parfois presque abstraites, mais en 1940, il arrête de peindre. En 1931, il reçoit l’Ordre du Mérite.
Il meurt à Londres le 18 mars 1942. Son autoportrait fait partie de la collection de la Galerie des Offices, à Florence.
Elizabeth Nourse est née à Cincinnati le 26 octobre 1859 à Mount Healthy (Ohio), dans une famille catholique. Après des études brillantes, elle décline l’offre d’un poste d’enseignante afin de se concentrer sur son art. Orpheline dès 1882, elle part brièvement étudier à l’Art Students League of New-York. En 1883, elle revient dans l’Ohio et acquiert une première formation à l’école des arts de Cleveland. Elle gagne alors sa vie en effectuant des peintures d’intérieur et en réalisant des portraits.
Elève de Jules Lefebvre et de Gustave Boulanger à l’Académie Julian à Paris en 1887, puis en 1888, durant trois mois, elle se perfectionne avec Carolus-Duran, le célèbre maître des portraits mondains du Second Empire, originaire de Lille. L’année suivante, elle commence un périple sur la Côte d’Opale, passant à Boulogne, Le Portel, Camiers, Etaples, où elle peint jusqu’en 1891. Après des voyages en Europe, (Italie, Allemagne, …) en 1893, elle s’installe définitivement l’année suivante au 80, rue d’Assas à Paris. En 1897, elle rapporte d’Algérie et de Tunisie, notamment de Biskra, des sujets berbères colorés.
Trois mois après la fin de ses cours en art, Elizabeth Nourse débute déjà aux Salons des Artistes français en 1888 avec Une mère! (illustration ci-dessus, Cincinnati Art Museum). Puis l’année suivant, elle envoie Dans la bergerie à Barbizon et Entre voisines. A partir de 1890, jusqu’en 1914, l’artiste se consacre au Salon de la Société nationale des Beaux-Arts, présente tous les ans. En 1890, pour sa première participation, elle propose : Dans la campagne, La dernière bouchée, La rue Chanoinesse (aquarelle) et La vieille cuisine fleurie (aquarelle). Les années suivantes, ce sont les sujets bretonnants et religieux qui animent son art. En 1898, sa spécialisation dans les sujets enfantins et familiaux s’affirme avec A l’abri, Dans le pré, La soif et Maternité.
En 1895, elle devient sociétaire de la Société nationale des Beaux-Arts. A ce Salon en 1903, elle présente quatre peintures et six aquarelles et pastels qui sont remarqués par la critique : des sujets bretons pour dénoncer la famine terrible qui sévit durant l’hiver 1902-1903, et la représentation de la Procession de Notre-Dame de la Joie qui a lieu le 15 août à Penmarch. Elle y revient en 1912 avec l’Eté,
Artiste complète, elle aime la peinture à l’huile, le dessin, l’aquarelle, le pastel. En 1889, elle connaît un grand succès avec Pêcheuses de Picardie (Smithsonian American Art Museum), figurant une fillette et sa mère, revenant d’une pêche à pied dans les alentours d’Etaples. Cette œuvre emblématique est également éditée en bronze, produite à dix exemplaires par un fondeur, qui retranscrit parfaitement l’ambiance voulue par l’artiste. La sculpture, très réaliste, nous montre une mère tenant un filet de pêche et son enfant dans l’autre main. Du haut d’un piédestal dunaire, ensemble, ils scrutent la mer. La force du vent devient perceptible par les plis des drapés des vêtements. Cette scène maternelle face aux éléments naturels, dégage une force et une émotion palpables. L’artiste édite d’autres bronzes à l’époque, notamment des bustes de sa famille, Louise et Caleb Nourse.
Elizabeth Nourse est aussi active dans les expositions montées par la Galerie Georges Petit à Paris, notamment lors des événements consacrées aux femmes artistes. Cette galerie éponyme est une institution incontournable du marché de l’art français jusqu’au début des années 1920. Implantée dans la rue de Sèze, sa vaste salle d’exposition de 300 mètres carrés s’offre aux visiteurs après un escalier monumental. Particulièrement sophistiqué, « l’établissement est servi par des sols parquetés recouverts de tapis rouges, des murs tendus de velours brun, et par un ingénieux système de lustres qui s’élève et s’abaisse à volonté. […] Les salles spacieuses de la galerie permettent de mettre en valeur les œuvres exposées ; on est loin de l’accumulation des toiles perdues dans la cohue des Salons« .
En janvier 1896, à la Galerie Georges Petit, elle participe à la 4ème Exposition de la Société des Femmes Artistes, au côté de Marie Duhem entre autres, présentant sept œuvres dont : étude de Bébé et Tête d’Enfant. En 1906, elle revient pour la 14ème Exposition de la Société des Femmes Artistes, envoyant quatre œuvres dont Fillette (pastel) et La petite sœur (dessin), puis une dernière fois en 1908. Tous ces sujets tendres, maternelles et sentimentaux, reçoivent un très bon accueil de la critique et du public. En mai 1915, elle participe à la Grande Tombola des artistes et des écrivains français, offrant un dessin aquarellé intitulé Fillette.
Très féministe et sensible à la condition des enfants, elle se fait spécialiste d’une peinture quelque peu sociale, produisant nombre de portraits de fillettes et de gamins dans la pauvreté ou au travail. Elle participe à la Société des Peintres orientalistes français de 1904 à 1906, sans grand succès. Elle intègre, avec Virginie Demont-Breton, la fameuse Union des Femmes Peintres et Sculpteurs (UFPS), installée à Paris. Elle y présente en 1916 : Consolation (peinture) et Mère et Bébé (dessin).
En octobre 1908, pour la 19ème Exposition du Water Color Club à New-York, l’artiste présente Le repas en famille (non localisé), figurant une famille étaploise attablé dans son intérieur modeste. Une miche de pain, peu agréable, trône sur la table. Regardant sa mère, l’air inquiet, la fillette comprend déjà la détresse de ses parents qui peinent à nourrir la petite famille. L’œuvre reçoit un grand succès.
Durant la Première guerre mondiale, Elizabeth Nourse est très active pour l’aide de guerre. Pour son action, l’artiste reçoit en 1915 une médaille d’or lors de l’exposition de San Francisco, puis en 1919, une plaque d’argent de la Société des Beaux-Arts, en reconnaissance de son travail pour les artiste victimes de la Grande guerre. Durant l’hiver de 1917, intégrée à la Croix-Rouge, elle aide les prisonniers qu’elle croque de sa plume à ses temps perdus. En 1921, elle reçoit la médaille Laetare lors de son retour aux Etats-Unis, accompagnée des félicitations du nonce apostolique.
En 1920, à l’invitation de Tanner, elle expose La mère et la ménagère à l’Exposition du Touquet. Après la mort de sa sœur jumelle en 1927, sa santé se dégradant, elle cesse alors d’exposer. L’artiste meurt le 8 octobre 1938 à Paris. Une très large partie de son œuvre se trouve réunie au Cincinnati Museum, une masse de 500 peintures, aquarelles et dessins, reflétant son talent.
Par le choix et l’intensité de ses sujets et de son art, Elizabeth Nourse peut être considérée comme « précurseur de la peinture sociale réaliste », à l’instar de Jules Adler.
Edouard Marie Houssin est né à Douai le 13 septembre 1847, fils d’un employé de l’hôpital général de Douai. Après sa scolarité, il entame un parcours aux académies de Douai dès 1856, puis suit des cours de sculpture d’architecture et de dessin jusqu’en 1864. L’année suivante, il gagne Paris pour terminer sa formation auprès des sculpteurs François Jouffroy, puis d’Aimé Millet (1877). En 1868, il présente son premier buste à la Société des Amis des Arts de Douai.
Après la guerre de 1870, il est nommé professeur aux académies de Douai et s’installe à Paris. Après vingt ans de carrière, il est nommé professeur de modelage à la Manufacture nationale de Sèvres (1894). En 1890, il découvre Wissant et son village de pêcheurs pittoresque grâce au couple Demont-Breton. En août 1891, il achète un premier terrain pour y établir un atelier provisoire, puis le 23 août 1892, il acquiert une fermette au lieu-dit le Vrimetz où il installe son dernier atelier. Adrien Demont en parle avec émotion dans ses mémoires en 1927 : « Notre ami le statuaire Edouard Houssin, né aussi à Douai, s’installa à peu près en même temps que Mlle Valentine Pèpe avec sa charmante famille, au Vrimetz, hameau attenant à Wissant, où il se fit un atelier. Houssin avait déjà fait mon buste et ceux de Virginie et de mon beau-père Jules Breton. Il fit aussi ceux de nos trois enfants Louise, Adrienne, Eliane. Ceux de Louise et d’Adrienne ont été édités avec notre autorisation par la manufacture de Sèvres en grandeur nature et en réduction. Ils ont fait partie d’un cadeau que la France faisait au roi d’Angleterre Edouard VII. Ils sont désignés au catalogue de Sèvres sous ce titre : les enfants de Houssin. »
En 1893, Edouard Houssin présente un buste en bronze de Virginie Demont-Breton à la fameuse Exposition Internationale d’Art de Chicago. L’année suivante, il est nommé professeur de modelage à la Manufacture nationale de Sèvres jusqu’à son décès. En 1895, Fernand Lefranc écrit dans La Revue du Nord : « Ses bustes, tous d’une exactitude irréprochable et admirablement enlevés, ne comptent plus. »
En 1903, le sculpteur réalise Le bateau de sauvetage, une œuvre monumentale en bronze de 300 kilos, qu’il présente au Salon des Artistes français à Paris. Conservé au musée de la Chartreuse à Douai, ce groupe figure des marins wissantais au travail pour lancer un navire de sauvetage en mer.
Plusieurs monuments et statues dans le nord de la France au Salon, on remarque de nombreux bustes, souvent en bronze. Edouard Houssin a également produit des séries en biscuit de Sèvres et en bronze avec diverses patines :
– Enfant à la panthère, groupe (1881)
– Esmeralda, statuette (1883)
– Phaeton, statue, 240cm, (1889), dans un jardin public de Briançon
– Jules Breton, buste en plâtre patiné. La terre cuite est conservée au musée d’Arras (1893)
– Le Bateau de sauvetage, haut-relief (1904)
– Homme lançant une pierre, musée de Douai
– L’Amour piqué par une abeille, musée de Douai
– Léda, musée de la Rochelle
Œuvres en fonte de fer, par les fonderies Salin :
– Deux pages
– Saint Ignace de Loyola
Durant sa carrière, Edouard Houssin reçoit plusieurs mentions honorables (1879, 1881, 1883, 1885) ainsi que des médailles (troisième classe en 1887, deuxième en 1889) dont deux en bronze lors des Expositions Universelles de 1889 et 1900 à Paris.
En marge des expositions parisiennes, Edouard Houssin expose beaucoup dans les salons du Nord, à Douai de 1868 à 1910, essentiellement des groupes en bronze, des bustes, des plaques et des portraits (bronze, plâtre, biscuit de Sèvres, grès flambé) Il produit les bustes des filles Demont-Breton, Adrienne et Louise, en 1893, puis la dernière fille Eliane en 1908. Jules Breton et sa femme, ainsi que le couple Adrien et Virginie Demont-Breton, seront également immortalisés par son œuvre.
Edouard Houssin meurt le 15 mai 1919 à Paris. Certaines de ses œuvres ont disparu durant la Seconde guerre mondiale, fondues pour la plupart par l’ennemi.
François Joseph Alexandre Houzé est né le 18 octobre 1837 à Tournai en Belgique. Dans son pays, il suit les cours de Joseph Stallaert. Il intègre ensuite l’École des Beaux-Arts à Lille où il reçoit les conseils d’Alphonse Colas, avant de devenir peintre décorateur à Arras.
Après avoir fait ses premières études aux académies de Lille, où il obtint toutes les premières récompenses, Alexandre Houzé exécute en 1857 une copie du tableau de Louis Gallet, représentant Les derniers honneurs rendus au comte d’Aigremont. Cette commande lui rapporte alors la belle somme de 300 francs. Avec cet argent, le jeune artiste tente fortune à Paris. Il raconte : « A 20 ans, et 500 francs dans ma poche, grisé par quelques succès, je croyais mon avenir assuré. Hélas! ce n’était que désillusions qui m’attendaient dans la Capitale… » En effet, il commence sa carrière en entrant chez un décorateur où il gagne deux francs par jour. Découragé, il renonce à la lutte, et revient travailler à Lille où il fait bien vite apprécier ses remarquables qualités. Il s’y installe définitivement.
Il vient faire des tableaux à Calais à plusieurs reprises. C’est à cette époque, pendant ses pérégrinations à travers les sites Artésiens, qu’il découvre, en compagnie d’Adrien Demont, le délicieux pays de Wissant. Pendant 25 ans, il exposa régulièrement au Salon des Artistes français. Il se crée une place toute particulière parmi les peintres de la région. Aussi, est-il justement appelé par ses nombreux amis le « Corot du Nord ». La saveur qui se dégage de ses œuvres est d’une exquise poésie, et d’une véritable sincérité.
Au Salon de Paris de 1879, Houzé présente une première œuvre montrant Wissant qu’il intitule Une ferme à Herlen. Dès 1883, il rejoint le couple Demont-Breton à Wissant, puis participe au groupe de ces artistes, Fernand Stiévenart, Félix Planquette, Georges Maroniez, … Il produit alors des œuvres marines ou champêtres de cette région, de nombreuses études d’après nature, réalisées d’une touche délicate et fine, dans des tons sobres et subtils.
Au salon, Alexandre Houzé expose : Le Pont de Canteleur – Le Portel – Le lever du matin à Allain (Musée de Lille) – Lever sur l’Escaut (Musée de Lille) – Les bords du Gave (Lourdes) – Vue de Place – Le Pont Loyes à Allain (effet d’orage) – Les moulons en plaine – Les dunes de Wissant – Le village d’Allain (effet de soleil) – Atelier de Monsieur Demont-Breton à Wissant – Derniers rayons de soleil – Route de la Corniche (vue de Nice) – Le cap Saint Jean (Nice) – Villefranche – Une nature morte – Le faisan – Une route à Tournai (effet de soleil) – La chaumière (effet du matin) – La chaumière (effet du soir). Parfois, sa palette, toujours solide, se transforme : c’est une mystérieuse gamme de tons largement brossés dans des gris d’une excessive finesse. Puis, ce sont d’autres conceptions où l’artiste se transforme dans de chatoyantes teintes.
Très imprégné par son métier, Alexandre Houzé laisse le souvenir d’un peintre investi, dès l’aurore, à parcourir le village et ses alentours, la mer et l’estran, à la recherche de dunes ou de champs à fixer sur la toile. Durant sa carrière, il participe régulièrement au Salon de Paris, avec notamment des vues de la Côte d’Opale dont Marée basse à Wissant en 1881, Le Port de Calais en 1890 et La Deûle l’année suivante, Coucher du Soleil à Wissant en 1900. Membre fondateur de la Société des Artistes Lillois avec Pharaon de Winter (1890), il y expose sans discontinuités jusqu’en 1907. Un an après sa mort, une rétrospective de ses œuvres est organisée lors de la 22ème Exposition des Artistes Lillois en 1909. Veuf d’Anne Wells, Alexandre Houzé meurt le 29 novembre 1908 à Lille, et il est enterré au cimetière de l’Est de la commune deux jours plus tard.
Alexandre Houzé est surtout représenté au musée de Tournai. Cependant, Matin à Allain et Tournai le matin sont conservés au Palais des Beaux-Arts de Lille.
Petit-fils du peintre Henrik Arnoldus Thaulow, Frits Thaulow est né le 20 octobre 1847 à Christiana en Norvège. Il est considéré comme un des pionniers de la peinture naturaliste norvégienne. Elève à l’académie de Christiana, à Oslo, puis à l’académie de Copenhague entre 1870 et 1872, il rêve alors à une carrière de peintre de marines. Dans ce but, il passe alors deux hivers à étudier avec le paysagiste norvégien Hans-Fredrik Gude (1825-1903) en Allemagne.
Après 1872, il renonce définitivement à ses études de pharmacie et part suivre les cours à l’Académie des beaux-arts de Copenhague, où il est l’élève du peintre danois C. F. Sorensen. En 1874 , il épouse Ingebord Gad, belle-sœur de Paul Gauguin. Alors que son beau-frère, Paul Gauguin, peint comme les Impressionnistes, Thaulow n’a pas encore assimilé la leçon des peintres de Barbizon. Il préfère à Manet des peintres comme Jules-Bastien Lepage ainsi que d’autres Réalistes français à la facture plus académique. Nomade impénitent, Frits Thaulow effectue de nombreux voyages en Norvège, en Danemark, en Suède, en Hollande, à Londres, à Karlsruhe, à Philadelphie et à Paris où il revient chaque année. Il voyage sur son bateau personnel en Norvège et en Danemark.
Dès lors, les premières toiles que Thaulow expose au Salon entre 1877 et 1880 ne connaissent qu’une faible adhésion du public parisien. Mais, très vite, le romantisme de sa première manière évolue vers un réalisme sentimental influencé par la peinture française qu’il fait découvrir à ses amis artistes nordiques. Très actif, il a sa part dans le succès à Paris de l’école scandinave, dont Peder Kroyer. De retour à Oslo, il encourage le jeune Edouard Munch, qu’il protège contre un public peu accueillant. De 1888 à 1892, Thaulow peint des scènes de plein air à travers toute la Norvège. Divorcé depuis 1883, il se remarie avec Alexandra Lasson en 1886. Juré de l’Exposition universelle de 1889, Frits Thaulaw participe à la création de la Société Nationale des Beaux-Arts en 1890. En 1892, il s’installe en famille en France et séjourne souvent à Dieppe. En 1897, l’artiste signe un important contrat d’exclusivité avec la fameuse galerie Georges Petit à Paris. la même année, il reçoit une médaille de deuxième classe à Pittsburgh.
Au printemps de 1892, Frits Thaulow et sa seconde épouse, la décoratrice Alexandra Thaulow, s’arrêtent par hasard sur le chemin de Paris, à la gare de chemin de fer d’Étaples. « Arrêtons-nous ici pendant deux heures », proposa Alexandra. Les nouveaux arrivants ne tardent pas à découvrir sur la Grand-Place l’hôtel d’Antoine loos et la petite colonie d’artistes qui s’y est installée. La convivialité naturelle du couple Duhem invite la famille norvégienne à les héberger dans le village voisin de Camiers, dans leur longère champêtre. C’est ainsi que les Thaulow demeurent six mois dans le Boulonnais, se liant avec tous les peintres travaillant sur place : « Une bande de jeunes et joyeux artistes, se souviendra Alexandra, dont la plupart devinrent des amis pour la vie. » D’une quinzaine d’années l’aîné de ses camarades, Thaulow est un véritable Scandinave protecteur de la nature, adepte du camping, voyageant sans cesse à pied, à bicyclette, en train ou en voilier.
Parce qu’il chérit la peinture française, il était venu pour la première fois à Paris en 1874, assister notamment à la première exposition impressionniste. Peu à peu, son style s’affirme, ses paysages de neige, ses lits de rivières commencent à ravir le public français. Par un échange d’études dédicacées, ce sympathique géant aux yeux clairs, plein d’humour, réfractaire aux idéologies, scelle avec Henri Le Sidaner une bonne amitié. « Un ami, écrivit-il à Auguste Rodin, un jeune Français qui est l’un des hommes les plus doués, les plus intelligents et les plus nobles que je connaisse, de l’honnêteté duquel il m’est impossible de douter. » (Derniers Impressionnistes, Yann Farinaud-Le Sidaner).
Frits Thaulow peint Camiers, des scènes de moisson et Camiers la nuit, l’un des nombreux tableaux nocturnes accompli dans la technique du pastel, diffusant l’extraordinaire lumière d’une nuit d’été. La découverte de Montreuil incite le peintre à traduire dans ses toiles les eaux miroitantes de la Canche, à l’image de son maître incontesté, Claude Monet. Thaulow peint aussi Le Moulin de Montreuil-sur-Mer, d’une mise en page audacieuse.
Après avoir traité des sujets paysagers avec un pleinairisme très apprécié en Scandinavie, Thaulow s’oriente vers un impressionnisme proche de Whistler. Son exécution brillante est très appréciée du public – Rodin échangera des marbres contre ses tableaux – et de nombreux amateurs comme Edmond Rostand et Sarah Bernhardt. Jouissant d’une véritable reconnaissance, il mène une vie mondaine. On le retrouve en août 1900 sur la Côte d’Opale, où il affine sa technique près des rivières et des rives de la baie d’Ambleteuse. Surprenante par sa grande liberté de facture, la peinture de Thaulow parvient à animer les miroitements des eaux sur la surface de la toile.
Frits Thaulow meurt d’une embolie pulmonaire en plein succès, à Edam aux Pays-Bas, le 5 novembre 1906. Les œuvres du peintre norvégien figurent dans les musées de Bordeaux, Berlin, Leipzig, Rouen, Stockholm, ainsi qu’au musée Rodin à Paris, et enfin dans le Nord, aux musées du Touquet et du département du Pas-de-Calais (Maison du Port). Rétrospectives au musée Rodin en 1994 et au musée des Beaux-Arts de Caen en 2016.
François Emile Couteau est né à La Louvière en Belgique le 8 avril 1892. Après sa scolarité générale, il intègre l’Institut Van der Kelen à Bruxelles, qui est l’école industrielle et décorative de Belgique. Il en sort brillamment diplômé, le 23 avril 1911, reçu premier sur 60 après sept années d’études.
Peu avant la Première guerre mondiale, François Couteau arrive à Calais où il s’installe. Il est embauché comme peintre décorateur dans l’entreprise Haigneré-Delrue à Guînes. Durant le conflit, il doit repartir en Belgique soutenir l’effort de guerre. A son retour en France, il fonde sa propre entreprise à Calais qui obtient rapidement une grande renommée dans le Calaisis. Dès les années 1920, l’artiste propose au public des œuvres. Il produit alors des scènes de quai calaisiennes, des vues portuaires, des bouquets, dans une palette lumineuse et servis par un coup de crayon vif et expressif. Ses dessins à la plume sont d’une justesse et d’une vigueur remarquables. Toutes ces vues sont aujourd’hui un témoignage juste et artistique d’une vie disparue avec la guerre 39-45 et son cortège de destructions massives. Les principaux monuments de Calais, le beffroi, la grand place, les maisons du quai, la colonne Louis XVI, apparaissent en filigranes derrière les voiles rousses des navires de pêche.
Durant la Seconde guerre qui frappe durement la Côte d’Opale et surtout Calais, François Couteau s’engage avec la Croix Rouge, en hébergeant ses compatriotes belges, en organisant des dons de sang, en mettant en œuvre un centre d’accueil pour les réfugiés. Ses actions généreuses lui valent de nombreuses récompenses et médailles honorifiques, en France et en Belgique. Lors du retour des corps des cinq fusillés de la Citadelle en 1947, il produit leurs portraits qui sont exposés devant leurs cercueils. Il offre alors ces portraits aux parents des victimes.
Après la guerre, la restauration des grands salons de l’Hôtel de Ville est assurée par ses soins. A la même époque, il réalise une fresque religieuse destinée à l’Eglise du Sacré-Cœur, œuvre impressionnante mesurant 7m de haut sur 4,50m de large. Peinte à la gloire de Sainte Thérèse, elle représente divers objets religieux et des motifs floraux.
Pour les cinquante ans de leur mariage, pour leurs noces d’or, les Géants de Calais sont relancés en 1952. François Couteau participe au projet. L’artiste restaure les deux têtes et rafraîchit les couleurs de l’ensemble. Le 27 juillet 1952, les Géants effectuent leur première sortie d’après-guerre. Le matin, ils se rendent à la mairie pour écouter le carillon qui joue en leur honneur « La Marche de Jehan de Calais ». L’après-midi, ils président une grande fête avec la présence d’autres Géants dont Gédéon et Arthurine de Bourbourg, Roland d’Hazebrouck, Gargantua de Bailleul, …
François Couteau décède le 24 novembre 1966 à Calais, rue des 4 Coins. Aujourd’hui, une rue de la ville porte son nom. Peintre de talent, François Couteau laisse un nombre impressionnant de tableaux, dont beaucoup légués par sa fille au musée des Beaux-Arts de Calais après sa mort.