Pierre Célestin Billet est né à Cantin dans le Nord le 2 novembre 1836. Fils d’un industriel bien établi, il fait des études brillantes au lycée de Douai. Un temps pressenti pour reprendre l’usine familiale, il est poussé par une irrésistible vocation, et abandonne définitivement le commerce vers l’âge de 30 ans, pour s’adonner à son art favori la peinture. L’illustre peintre naturaliste Jules Breton vient à Cantin durant l’été de 1867, pour la première fois, afin de peindre avec lui et de lui prodiguer des conseils.
Très vite, grâce à Jules Breton qui l’influence largement dans son art, sa technique et le choix des sujets, Pierre Billet est admis au Salon de Paris. Il présente alors des scènes champêtres, des paysannes au travail, puis des scènes maritimes, des pêcheuses à l’attente et des effets de mer, dont :
- Les Suites d’une partie de carte, Salon de 1867.
- L’Attente, Salon de 1868.
- Pêcheur sur la plage d’Ambleteuse, Salon de 1869.
- Pêcheuse des environs de Boulogne, Salon de 1870, acquis par le musée de Lille.
- L’Heure de la marée, côte de Normandie, Salon de 1872.
- Pêcheuses et Coupeuses d’herbe, Salon de 1873 (médaille de 3ème classe).
- Contrebandiers et Ramasseuses de bois, Salon de 1874 (médaille de 2ème classe).
- En hiver et Souvenir d’Ambleteuse, Salon de 1875.
- Jeune maraîchère et Une source à Yport, Salon de 1876.
- Pêcheuses d’équilles et Un bûcheron, Salon de 1878.
- Avant la pêche, Salon de 1879.
- Les Glaneuses, Salon de 1881.
- Pêcheuse de crevettes, Salon de 1883.
- Ânes sur la plage, Salon de 1884.
- La Pêche des crevettes, Salon de 1888.
- Exposition Universelle de Paris de 1889, (médaille de 2ème classe).
- Une Bergère, Salon de 1890.
- Femme de Pêcheur, Salon de 1892.
- Ramasseuse de pommes de terre, Salon de 1895.
- Souvenir du Cap d’Alprech ; Pêcheuse du Portel, Salon de 1896.
- Marée basse, Salon de 1898.
Pierre Billet travaille souvent dans sa propriété à Cantin, dont le jardin lui sert de décor naturel. Dès 1876 et durant quelques années, il passe ses étés à Yport en Normandie, en compagnie de Jules Breton, pour croquer des pêcheuses et des bords de mer. A Cantin, les jeunes filles de l’artiste servent parfois de modèle pour camper une pêcheuse laborieuse ou une paysanne au repos. Son art est très vite reconnu par la presse et les salons d’art, car Pierre Billet « tient pleinement ce que promettaient ses débuts. Il vit avec ses modèles, il les suit dans leurs marches pénibles, lorsqu’ils reviennent courbés sous le faix. Il les regarde travailler, il étudie leurs gestes, leurs attitudes, et il nous les montre comme il les a observés. Ce bûcheron et son fils, qui s’arrêtent pour allumer leurs pipes, sont peints et composés avec une expression remarquable, et possèdent cette désinvolture familière, simple et un peu triste, qui marque le caractère des habitants de nos campagne du Nord. Les Pêcheuses d’esquilles, qui ont quelques ressemblances avec les Pêcheuses de Boulogne du musée de Lille, sont également très remarquables. Bien que peints en plein air, les personnages ont un relief saisissant » (commentaires sur le Salon de 1878, Le Progrès du Nord, juillet 1878).
A partir des années 1890, Pierre Billet engage son art vers plus de modernité. Il se détache de l’enseignement de Jules breton et adopte un style plus libre. Il fréquente les artistes d’Étaples et de Berck où il se rend souvent l’été. Il peint la plage de Berck et du Touquet, des vues panoramiques de la Canche à Étaples, dans une touche enlevée et dynamique.
Pierre Billet participe également activement aux Salons régionaux du Nord de la France. Il débute ainsi en 1881 au Salon des Arts de Lille avec Les Glaneuses, sujet emblématique du moment, acquis par le musée. Il présente ensuite à l’Exposition de la Société des Amis des Arts d’Étaples de 1892, sous l’égide d’Eugène Chigot, Le Soir à Étaples. De 1910 à 1914, il envoie au Salon des Beaux-arts du Touquet un total de onze œuvres, figurant essentiellement des dunes, des vues maritimes et de la Canche, ou encore des sous-bois. A Douai, dès 1870 jusqu’en 1911, il propose des huiles représentant surtout des scènes champêtres. En 1884, il fait une exception en envoyant une série d’œuvres orientalistes, des vues du port d’Alger et quelques portraits de bédouins.
En 1907, l’artiste achète une petite masure dans l’arrière-pays du Touquet : « Imaginez-vous, sur un petit chemins sans issue, une infime ferme délabrée ; derrière la barrière d’entrée, un fumier sérieusement avancé, au sommet duquel picorent quelques poules et un coq qui accueille avec arrogance le rare visiteur. A gauche, une petite maison proprette, c’est l’habitation […] C’est là que vit depuis six ans, hiver comme été, un vieillard robuste, estimé et aimé, le grand peintre Pierre Billet« . Pour ses déplacements quotidiens, « deux fillettes l’aident et lui servent de modèles pour les personnages dont il a besoin« . Pierre Billet travaille sans relâche, « il part le matin dans la forêt du Touquet, arrive au hasard de la promenade à un endroit où il s’arrête, jette sa canne et commence à peindre » (presse du Nord, 1913).
A partir des années 1910, ses participations aux différents salons et expositions s’estompent largement. Vieillissant, atteint d’une cataracte très invalidante, l’artiste peine à produire son art. Utilisant une bougie en transparence sur la toile, il continue à peindre des scènes plus intimistes, sa famille dans la vie quotidienne, usant d’un tracé simple et de couches picturales très estompées. Pierre Billet souffre beaucoup, comme d’autres artistes du Nord, les Duhem, les Breton, la famille Maroniez, de l’occupation allemande durant la Première guerre mondiale. Son atelier est pillé, la vie devient survie. Âgé, il s’éteint à Cantin le 26 novembre 1922.
Pierre Billet a peu dispensé son art. Il enseigne tout de même à sa fille Aline Billet-Guérin qui expose durant son vivant, également à Maurice Lévis (1860-1940), et surtout à Georges Maroniez, peintre de marines, originaire de Douai, qui rejoint ensuite Adrien Demont à l’Ecole de Wissant. L’œuvre de Pierre Billet est représenté dans plusieurs musées, notamment à Douai au musée de la Chartreuse, au Touquet, à Lille, à Glasgow et à Saint-Pétersbourg.
Auteur : Yann Gobert-Sergent